Cette femme ne savait rien faire d’autre que d’entrer. Elle
entrait – par la porte d’une salle de réception et au milieu des gens, ou dans
une baignoire, ou au lit où son amant l’attendait – comme un grand chanteur
arrive sur la scène, comme le pape dans la salle du trône, où il reçoit
l’hommage des délégations des croyants de ce monde, comme un chef de guerre pénètre
dans la ville conquise, où des bourgeois barbus, pâles lui présentent aussitôt
les clés sur un coussin de soie. C’est ainsi qu’elle entrait. Elle apparaissait
sur le seuil ou prenait place au lit, et les témoins étaient remplis d’un
sentiment d’attente solennelle. Mais alors, tandis que disparaissait la magie
de l’entrée, il ne s’en suivait plus rien. Avec l’entrée elle avait tout dit et
tout fait, de ce qu’elle savait dire et faire dans la vie. Et alors elle était
simplement assise ou allongée ou conversait. Elle avait couvert
le monde une fois pour
toutes. Son travail était fait, elle n’avait pas d’autres tâches, elle aurait
aussi bien pu mourir, car elle avait déjà fait son entrée.
Extrait de "Ciel et terre"
d'après la traduction en allemand d'Ernö Zeltner
d'après la traduction en allemand d'Ernö Zeltner
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