Un des joyaux de "Ciel et terre" (Ég és föld )
TRESOR DES PAUVRES
La nouvelle domestique vit depuis quelques semaines dans le trou que ces messieurs-dames lui ont attribué comme chambre près de la cuisine. Il mesure quatre mètres carrés : pour le lit métallique rabattable, la place suffit, pour rien d’autre. A quelques clous plantés dans la porte la fille a accroché ses quelques haillons, toutes ses hardes.
Pourtant maintenant, comme elle se sent déjà tout à fait « chez elle », elle dispose ses trésors timidement et avec précaution aussi. Elle possède une poupée, et elle a aussi un objet d’art : une statuette féminine en marbre artificiel avec une robe échancrée jusqu’à la taille… un petit coussin de soie lui appartient aussi, quelque chose d’élimé, d’effrangé. Voilà tout son avoir.
Les objets me touchent profondément, mes yeux se mouillent quand je les observe. Dans le monde petit-bourgeois où de tels bibelots étaient parure et ornement, je me serais détourné plein de dégoût et de mépris de ce bazar. Mais ici, dans la chambre de la domestique, ils irradient recueillement et vénération comme les trésors du Louvre. « Il faut qu’il y ait dans la vie quelque chose de beau devant quoi se recueillir, il faut bien quelque chose à quoi croire, sans l’art la vie serait sordide ! » – c’est ce que disent ces objets – « Il faut aussi quelque chose de précieux dans la vie ! » Troublé et sans voix je m’arrête. Bien sûr, sans un trésor on ne peut pas vivre.
Extrait de "Ciel et terre"
d'après la traduction en allemand d'Ernö Zeltner
d'après la traduction en allemand d'Ernö Zeltner
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